Le Medef provoque le débat
ÉCONOMIE. Ouverture des commerces le dimanche, suppression de plusieurs jours fériés, assouplissement des35 heures... Sous l’égide de Pierre Gattaz, Le Medef s’apprête à proposer plusieurs solutions sensées créer 1 million d’emplois. Mesures inévitables pour certains, provocantes pour d’autres... Les propositions du syndicat patronal ont provoqué le débat hier entre les différentes organisations syndicales et patronales, mais aussi au sein du monde économique.
Pierre Gattaz l’avait annoncé dès son arrivée à la tête de l’organisation patronale. Le président du Medef veut créer un million d’emplois d’ici 2017. Lundi 15 septembre, le quotidien « Les Échos » s’est procuré un document d’une cinquantaine de pages, composé d’une série de mesures visant à créer pas moins d’un million d’emplois en France. Parmi les mesures phares figurent l’ouverture des commerces le dimanche, l’assouplissement des 35 heures, la suppression de certains jours fériés, la baisse des cotisations patronales, ainsi que la modification des seuils sociaux. L’organisation patronale qui avait prévu de présenter l’ensemble de ces mesures, a annoncé hier qu’elle reportait l’annonce officielle à mercredi 24 septembre.
« Provocation »
Trop tard. Le document intitulé « comment relancer la dynamique de créations d’emplois en France », a déjà provoqué le débat, notamment auprès des syndicats de salariés qui prennent l’annonce de ces mesures comme un coup de couteau dans le dos. « Nous n’avons pas été prévenus par le Medef de ces mesures lors de nos dernières réunions. Nous voulons nous battre pour le dialogue social, mais il faut être deux », accuse Claudine Lavail, secrétaire régionale de la CFDT (Confédération Française Démocratique du Travail). En début d’année 2014, le syndicat avait accepté le Pacte de Responsabilité proposé par le Medef à la condition d’obtenir des contre-parties de la part de l’ensemble des partenaires. « Ces mesures sont un ensemble de provocations et elles n’ont aucune valeur », tranche la syndicaliste. De son côté Force Ouvrière dénonce une organisation patronale « décomplexée », selon les propos de JérômeCapdevielle, secrétaire départementale de l’Union Départementale Force Ouvrière (UDFO), inquiet d’une dérégulation du code du travail. « Je ne crois pas à cette stratégie de flexi-compétitivité. C’est faux, car la compétitivité n’est pas le frein à la reprise de l’économie. Actuellement, les entreprises manquent de carnet de commandes », dénonce Jérôme Capdevielle.
Les PME non représentées
« Le patron du Medef ne connaît pas notre histoire », a déploré le président de la Chambre d’Artisanat Gérard Capdet. Selon le représentant des métiers de l’artisanat, la priorité est ailleurs : « il faut protéger les frontières et limiter la concurrence transfontalière en dehors de l’Europe, au lieu d’insulter les travailleurs et de revenir sur des acquis sociaux ». Opposé à l’ensemble des idées proposées par le Medef, Gérard Capdet a souligné l’écart entre le grand patronat et les petites entreprises. Le président de la chambre de l’artisanat a aussi dénoncé une « agression », contre les salariés. « Ce n’est pas comme cela que l’on améliorera le dialogue social », a-t-il finalement ajouté. « Ces mesures ne représentent pas les PME », s’est exclamé le député PS Jacques Cresta, qui demande au Medef de répondre aux réelles préoccupations des entreprises et d’évaluer le nombre d’emplois générés par le Pacte de responsabilité. « Nous n’avons aucun chiffre depuis des semaines » a ajouté le chef de file du PS dans les PO. Plus nuancé, Jean-Pierre Navarro s’est dit favorable à l’assouplissement des 35 heures et à la suppression de certains jours feriés. « Aujourd’hui, nous travaillons 1600 heures par an en moyenne en France. Les pays européens travaillent en moyenne 2100 heures », s’est justifié le président de la Chambre de Commerce et d’Industries des Pyrénées-Orientales. Jean-Pierre Navarro s’est toutefois opposé à d’autres mesures comme la proposition d’ouverture des magasins le dimanche, qui aura selon lui des conséquences négatives sur le commerce de proximité.
« Je milite pour une harmonisation fiscale et sociale»
« Nous avons tous besoin de faire des efforts », a lancé Daniel Mach, secrétaire départemental de l’UMP66. Le politique a dénoncé une économie « beaucoup trop administrée » et une « stigmatisation des chefs d’entreprise ». Présidente de la Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises, Myriam Subiros s’est quant à elle déclarée favorable aux mesures proposées par le Medef, mais qu’elles ne répondaient pas à l’ensemble des chefs d’entreprise. « Je milite pour une harmonisation fiscale et sociale ». La représentante des PME souhaiterait notamment une hausse de la TVA sociale. À l’heure où le Gouvernement de Manuel Valls organise un vote de confiance aujourd’hui, les mesures du Medef sont davantage perçues comme une provocation, plutôt qu’une réelle feuille de route pour l’emploi en France.
Les mesures du Medef pour créer1 million d’emplois
- Supprimer deux jours fériés sur onze, afin de créer 100 000 emplois ;
- Modifier les seuils sociaux, qui visent à encourager le dialogue social (élection de délégués du personnel, création de comités d’entreprises...) Objectif : assouplir les obligations, qui seraient un frein à l’embauche selon le syndicat ;
- Ouvrir les commerces le soir et le dimanche, afin de créer entre50 000 et 200 000 emplois dans le tourisme et entre 40 000et 100 000 emplois dans le commerce et la distribution.
- Baisser les cotisations patronales, en transformant le Crédit d’impôt Compétitivité Emploi (CICE), en baisse de cotisations.
- Généraliser le contrat de chantier à tous les secteurs