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Les avocats en grève pour sauver l’aide juridictionnelle

JUSTICE. Les avocats étaient en grève nationale ce jeudi 5 juin 2014. Ils demandent une revalorisation du montant consacré à l’aide juridictionnelle (AJ), une mesure qui permet aux personnes aux revenus modestes, de pouvoir bénéficier d’une prise en charge des honoraires d’avocat et des frais de justice.

Défendre oui, mais à quel prix ? Ce jeudi 5 juin, 70 avocats sur les 300 qui composent le barreau des Pyrénées-Orientales, se sont rassemblés devant le tribunal de Grande Instance de Perpignan. « Par ailleurs, l’ensemble des 300 avocats étaient en grève », tient à préciser Gilles Boxo, bâtonnier de l’ordre des avocats de Perpignan. Comme pour l’ensemble des barreaux de France, il a refusé de désigner des avocats pour les commissions d’office, les permanences et toutes les consultations gratuites.

Résultat, l’ensemble des audiences du tribunal correctionnel ont été reportées au mois d’octobre prochain et les procédures de garde à vue ont également été suspendues pendant quelques heures, jusqu’à ce jeudi soir.

Revaloriser le budget consacré à l’aide juridictionnelle

Les avocats sont inquiets quant au financement du budget de l’aide juridictionnelle et réclament une augmentation de son montant ainsi qu’une plus forte implication du gouvernement (voir encadré). Dans le département des Pyrénées-Orientales, les aides juridictionnelles représentent environ 2,7 millions d’euros par an. Le problème, c’est que l’enveloppe fournie ne permet pas de pouvoir financer les rétributions nécessaires aux interventions des avocats.

« L’enveloppe est définitive en novembre et nous devons attendre la dotation de l’année suivante qui arrive plusieurs semaines plus tard, pour commencer à payer nos confrères », explique Gilles Boxo. Ce n’est pas la première fois que les avocats interpellent le Gouvernement. Déjà en 2013, l’actuelle ministre de la Justice Christiane Taubira avait du revoir sa copie et reporter une mesure qui visait à diminuer « l’indemnisation des avocats chargés de défendre les plus précaires ». Il y avait alors eu une diminution du budget juridictionnel de 9,3% sur le plan national. « Un chiffre considérable », estime Gilles Boxo qui craint cette année une baisse encore plus importante du budget alloué à l’aide juridictionnelle. Car la chancellerie a la mission difficile de trouver 100 millions d’euros supplémentaires pour boucler le budget de l’année 2014. Reste que les avocats ont l’impression que l’État leur demande toujours plus d’efforts. Rémunérés à hauteur d’environ 190 euros lors d’une aide juridictionnelle, pour préparer le dossier, défendre le client et assister à l’audience devant le tribunal correctionnel, ils tirent la sonnette d’alarme. « C’est notre travail de défendre nos clients nous avons prêté serment pour cela. Mais aujourd’hui nous sommes imposés pour défendre les plus faibles ». Un paradoxe pour Gilles Boxo.

« Une question de volonté politique »

Ce n’est pas simplement pour leurs salaires que les avocats s’inquiètent.

« Si le gouvernement ne décide pas d’une véritable politique en matière de justice, elle ne sera pas rendue correctement », affirme amèrement le bâtonnier. Selon le représentant du barreau, c’est l’équilibre des institutions judiciaires qui est en danger et le fonctionnement de la justice. Si la colère gronde, le ministère de la justice quant à lui, retarde le débat : « on nous annonce chaque année une obligation d’avoir un budget constant au niveau de l’aide juridictionnelle, mais sans augmentation de nos moyens ». L’ordre des avocats estime même que l’aide juridictionnelle devrait être doublée en France, ainsi que le nombre de magistrats. Une volonté politique avant tout, selon Gilles Boxo : « le budget réservé à la justice représente 1 % du budget de l’État... ». Reste que l’aide juridictionnelle fait partie du quotidien.

Car la défense des « plus faibles » concerne aujourd’hui des personnes aux revenus inférieurs à environ 1 500 euros. Soit une partie importante de la population, en France et dans le département des Pyrénées-Orientales.

L’aide juridictionnelle en France

Mise en place au milieu du XIXe siècle, l’aide juridictionnelle est née de la volonté d’offrir une justice pour tous les citoyens. Aussi appelée aide juridique, elle prend en charge la totalité ou une partie des frais de procédure et d’expertise, ainsi que les honoraires de l’avocat nécessaires lors d’une procédure judiciaire.

L’aide juridictionnelle représente 2,7 millions d’euros par an dans les Pyrénées-Orientales. Une grande partie est utilisée pour les procédures civiles et les affaires pénales (divorces, pensions alimentaires, droit de l’enfance, défense pénale). La garde à vue représente quant à elle 400 000 euros du budget alloué par l’État par an dans le département. Le reste des 2,7 millions d’euros est utilisé pour les affaires correctionnelles.

« C’est particulièrement important pour les affaires familiales ». En France, un barème est établi en fonction des revenus du justiciable. Il fixe la contribution de l’État : elle va de 100 % pour une personne qui dispose de moins de 936 euros par mois, à 15 % de prise en charge pour une personne qui justifie d’un revenu compris entre 1 299 à 1 404 euros par mois.

Le manque de moyens financiers a été de nombreuses fois souligné. Depuis que la garde des Sceaux a décidé de reporter la mesure de diminuer le montant des aides juridictionnelles en 2013, aucune proposition n’a été prononcée par la ministre. Aujourd’hui, le budget alloué à l’aide juridictionnelle se situe à la 37e place au niveau du Conseil de l’Europe, derrière l’Azerbaïdjan et l’Arménie. En 2014, le programme d’accès au droit est passé de 339,7 millions à 309,6, soit une baisse de plus de 9 %.

Marie Demeulenaere


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