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Perpignan : le tableau noir des enfants gitans


REPORTAGE. Située en plein cœur du quartier gitan de Perpignan, l'école la Miranda est unique en France. Depuis 2007, l’établissement accueille uniquement des enfants gitans. 214 élèves de moins de 13 ans participent à ce projet expérimental qui vise à palier la déscolarisation des jeunes de la communauté, dont encore beaucoup d'entre eux n'ont jamais poussé les portes d'un établissement scolaire. Mais la jeune génération gitane peine toujours à trouver un avenir et le dispositif de la Miranda s'essouffle. Aujourd'hui, malgré les tentatives d'adaptation de l'école et de certains parents, le choc des cultures persiste entre l'école et les gitans sédentarisés de Perpignan.

« Romania, descends ! ». Quelques secondes plus tard une fillette aux cheveux longs et noirs attachés en chignon descend en courant dans les marches du couloir étroit de son immeuble. Baskets, pantalon fleuri en velours, pull rose légèrement trop grand pour elle, Romania a des allures d'élève modèle, même si son sourire provocateur ajoute un côté mystérieux à cette jolie brune. Ce matin, elle va à l'école. À la différence des filles de son âge, ce ne sont ni ses parents, ni un bus qui emmène la fillette en classe, mais le directeur de l'école en personne.

Chaque matin à 8h15, Nicolas Pierre arpente les rues délabrées du quartier Saint-Jacques, pour amener une dizaine d'élèves à l'école. « Nous n'aidons pas toutes les familles, mais seulement celles dont les mères ont un problème de santé ou un enfant en bas-âge », précise le directeur de l'école la Miranda depuis 2009. Surnommé « cap a l'escola» en catalan, le système mis en place par la mairie fonctionne comme un programme de ramassage scolaire, mais celui-ci s'effectue à pied.

Alors que la machine des agents de nettoyage s'engouffre dans la rue Lucia, Nicolas Pierre continue son porte-à-porte. « Mon fils est malade ce matin. Il a fait la fête avec ses copains hier », crie une femme à l'appel du directeur. « Les enfants gitans se couchent très tard, souvent à deux ou trois heures du matin explique Nicolas Pierre, habitué des absences matinales des jeunes écoliers. Ils jouent à des jeux vidéos, ou ils accompagnent leurs parents lors des fêtes traditionnelles ». La porte d'à côté est déjà ouverte. Un petit garçon brun aux cheveux gominés sort de chez lui les yeux encore fatigués. « C'est bon, nous sommes au complet », lance Nicolas Pierre.

Romania se met à courir dans les rues encore désertes de Saint-Jacques, entre les pigeons agglutinés par dizaine autour des poubelles éventrées, les restes de nourriture et les jouets d'enfants. Au bout de l'allée, Jamila, la directrice adjointe, a elle-aussi terminé sa tournée. « Personne », soupire-t-elle.

Quelques mètres plus haut, la place du Puig se réveille dans le bruit des moteurs rutilants des voitures. Le centre névralgique du quartier gitan est aussi celui où s'entassent pêle-mêle une cinquantaine de voitures, des moteurs démontés, des carcasses d'automobiles et des bouts de plastique et de plexyglas.

Située aux confins des Pyrénées-Orientales dans l'extrême sud de la France, Perpignan abrite la plus grande communauté gitane sédentaire d'Europe occidentale. Sur l'ensemble des 115 000 Perpignanais, entre 5000 et 7000 gitans résident dans différents quartiers de la ville, dont le plus connu s'appelle le quartier Saint-Jacques, le cœur historique de Perpignan.

Un labyrinthe de rues étroites et sombres entoure la place. Difficile d'imaginer que quelques rues plus bas, la Place de la République ouvre ses cafés et ses commerces modernes. Le quartier Saint-Jacques abrite environ 3000 gitans, mais les estimations oscillent entre 5000 et 7000 sur l'ensemble des 115 000 perpignanais. Au volant d'une voiture bleue, un garçon d'une dizaine d'années se dispute avec un automobiliste. Lui ne va pas à l'école ce matin. Parmi les enfants, impossible de savoir exactement combien sont scolarisés, tant les chiffres précis sur la communauté sont flous. « Il y a des enfants que nous croisons tous les jours dans les rues, mais que nous n'avons jamais vu à l'école », regrette Nicolas Pierre en continuant son chemin vers l'école.

Un procédé unique depuis 2007

Dans le hall de l'école la Miranda, le drapeau de la communauté gitane est accroché au mur. Romania adore ses couleurs, vert, bleu et rouge. « Le bleu représente le ciel et le vert, c’est la terre », déclare la fillette comme si elle présentait sa nouvelle poupée. Au centre du drapeau, un signe rouge représente la roulotte, le symbole du voyage. À droite, deux autres drapeaux français et catalans complètent la décoration de l’entrée de l’école. C'est ici que 214 enfants sont inscrits dès l'âge de deux ans et demi. Ils fréquentent d’abord le centre de pré-scolarisation, avant de rejoindre l'école maternelle et l'école primaire. Le projet expérimental de la Miranda voit le jour en 2006, alors que la déscolarisation des enfants gitans est devenue alarmante. Sédentarisés définitivement lors de la seconde guerre mondiale, lorsque le Gouvernement de Vichy interdit le nomadisme, la communauté n'a pas réussi à prendre le tournant de l'industrialisation des métiers. C'est l’époque des « Trente Glorieuses. Alors que l'économie de la France est au beau fixe, le fossé ne cesse de se creuser entre la population française et la communauté gitane. Très peu scolarisés, les enfants sont analphabètes et connaissent plusieurs générations de chômage. Au début des années 1990, la ville catalane est pointée du doigt à cause. La mixité sociale présente au sein des différentes écoles du quartier s’est dégradée. De plus en plus pauvre, le quartier se transforme peu à peu en ghetto. Les parents retirent leurs enfants des écoles mixtes, soutenus par la mairie qui accepte la totalité des demandes de dérogation. Les écoles de Saint-Jacques deviennent malgré-elles uniquement gitanes. En 1991, le département de l'enfance de la ville décide de réagir en instaurant le centre de pré-scolarisation, qui accueille les enfants de 3 à 5 ans. Mais cela ne suffit pas. Les chiffres de la scolarité des jeunes gitans sont désastreux et très peu d'entres-eux sont scolarisés. Entre 2004 et 2005, 50 à 80 % des enfants gitans sont absents le matin et 38 à 67 % l'après-midi. En 2004, le taux de présence annuel moyen d'un enfant gitan ne dépassait pas quelques mois. Violences, manque de relation avec les parents gitans, professeurs à bout de nerfs... Les problèmes s'accumulent entre les familles gitanes et l'école. Même l'Education Nationale semble abandonner tout espoir.

Une réponse à l'exclusion

Il faudra un électrochoc pour que la déscolarisation des gitans devienne une préoccupation nationale. En mai 2005, Perpignan connait ce que les Perpignanais appellent encore « les évènements ». Suite à un règlement de compte, la place Cassanyes, qui abrite majoritairement la communauté maghrébine, et le quartier Saint-Jacques s'enflamment. Pendant une semaine, la ville tremble sous le bruit des fusils à plomb et vit au rythme du couvre-feu. Ce qui devait tenir d'un fais divers devient une crise nationale à laquelle il faut apporter une réponse politique. Suite aux émeutes de novembre 2005, plusieurs plans nationaux sont mis en place. Scolariser les enfants gitans devient une préoccupation de la ville.

En septembre 2006, la ville de Perpignan et la préfecture des Pyrénées-Orientales décident de réagir. « Nous nous sommes rendus compte que l'école fonctionnait mal. Il fallait trouver des leviers et essayer d'expérimenter de nouvelles idées », raconte Nicolas Pierre, qui était professeur à la Miranda avant qu’elle devienne un projet expérimental. Ramassage scolaire, programmes spécifiques pour chaque élève, partenariats avec des associations locales... À la Miranda, tout est adapté au rythme des élèves et rien ne ressemble à un programme scolaire classique. Horaires souples, loisirs...

Même le traditionnel « goûter » de la récréation se déroule à l'ouverture des portes de l'école. « Une manière d'intégrer les enfants avant le début des cours », continue l'actuel directeur. Grâce aux classes d'accueil déjà instaurées et aux partenariats mis en place avec les collèges de la ville, le projet expérimental porte rapidement ses fruits. Principal source de problèmes, l'absentéisme est fortement réduit. Le nombre d’élèves passe de 180 en 2008, à 232 en 2012. La fréquentation s'est également améliorée avec un taux de présence annuel aux alentours de 50 % en 2007.

« La Miranda a permis de transformer l'image de l'école », se réjouit Nathalie Beaufils, adjointe à la scolarité à la ville de Perpignan. Au total, la Miranda est composée de huit enseignants, quatre animateurs et quatre aides à la vie scolaire, dont plusieurs sont d'origine gitane. L'équipe a spécialement été recrutée pour le projet et veille à faire vivre l'école.

Retenir les enfants

Pourtant, les chiffres restent alarmants et le projet s’essouffle. En moyenne, 70 % des enfants sont absents. Depuis 2008, le nombre d'inscrits à même baissé, pour atteindre en 2015, 214 inscrits au total. Chaque jour, les intervenants s'adaptent au nombre d'élèves qui franchissent la porte de l'école. « Nous tournons avec une trentaine d'élèves mais ce sont tout le temps les mêmes », affirme Nicolas, professeur à la Miranda depuis dix ans. Une dizaine d'enfants sans cartable attendent assis sur le banc en bois pendant que les professeurs se mettent d'accord sur le programme du jour. Ce matin, ils ne sont qu’une dizaine au sein de l'école élémentaire et à peine autant sur le site de la maternelle, sur les 214 élèves inscrits. « Généralement les enfants sont motivés à la rentrée scolaire. Mais dès le mois de novembre, la fréquentation se dégrade », affirme Nicolas Pierre. Ce jeudi matin, Nicolas est abattu. Sur les 26 élèves qui composent sa classe, aucun n'est présent. Il devrait il y avoir une centaine d'enfants », regrette le directeur de l'école. Autour de la table, professeurs et animateurs haussent les épaules avec un sourire, tantôt las, tantôt nerveux. L'équipe a choisi de travailler ici. Nicolas a commencé à travaillé à la Miranda il y a une dizaine d’années, après un stage. « Ça m'a tout de suite plu. Je continue tous les jours à y croire car c'est possible de changer les choses », affirme-t-il. Pendant ce temps là, Romania, elle, vient d'avaler son chocolat chaud. La fillette de 9 ans débat vivement en catalan. En face, Vincent, une tête blonde aux yeux clairs, lui réponds sur le même ton. Tous les deux sont scolarisés en CE2. « Certains n'arrivent à l'école qu'à 9 ans, sans savoir ni lire ni écrire », assure le professeur.

Une équipe soudée

La vaste pièce du premier étage s'est transformée en salle de spectacle. Depuis plusieurs semaines, la classe de Jeanne prépare une pièce de théâtre sur le thème de la fable de Jean de la Fontaine, Le corbeau et le renard. La jeune femme dynamique explique patiemment aux enfants comment découper des nuages en papier. À 48 ans, l'enseignante travaille à la Miranda depuis 2009. Comme pour Nicolas, travailler ici est un choix. « C'est une expérience très riche. Nous sommes une équipe très solidaire et soudée. Nous partageons les mêmes valeurs et la même éthique et je pense que c'est important ». Jeanne a vécu dans le quartier pendant 4 ans lors de ses études. « C'est un endroit que je connais et que je n'appréhende pas », continue t-elle. Quelques minutes plus tard, deux nouvelles élèves font leur entrée sous les acclamations. « Enfin ! s'exclame l'institutrice ». Channel et sa sœur Shanon ne sont pas venues à la Miranda depuis deux mois. Une habitude pour l’institutrice, qui adapte ses cours. Depuis 2010, l'Éducation Nationale a supprimé les classes d'accueil. Les enfants sont directement envoyés dans les classes, suivant l'âge auquel ils entrent à l'école. Résultat : le personnel de l'école a regroupé les niveaux scolaires. CE2, CM1 et CM2 forment ainsi une seule et unique classe. Mais cette solution n’a pas permis la scolarisation des jeunes, bien au contraire. Seule la moitié des élèves de la classe de Jeanne sait lire et écrire. Devant les premiers rimes de la fable, Shanon hésite : « je n'ai pas révisé depuis longtemps ». Devant l'insistance de l'institutrice, elle finit par avouer : « depuis les attentats de Charlie Hebdo à Paris, mes parents ont peur et ne voulaient plus que je sorte pour aller à l'école ». Pourtant, la jeune fille adore l'école. Plus tard, elle rêve de travailler avec les animaux. Romania, elle, ne sait pas ce qu'elle veut faire plus tard. Elle est scolarisée depuis ses deux ans et demi, mais ne pense pas continuer après la Miranda. « J'ai pleins de copines qui ont déjà arrêté l'école », continue-t-elle. Après seulement quelques minutes de concentration, les enfants en ont assez de réciter les phrases de La Fontaine. Romania s'est déjà levée et chahute avec ses camarades. Les enfants se parlent en catalan. Vincent, le petit blond, est le seul garçon à être présent ce matin. « Les autres se couchent trop tard pour venir », finir par lâcher Vincent. Dans la classe de Jeanne, plus de la moitié des enfants sait lire et écrire.

L'avenir face au poids des traditions gitanes

« La Miranda a transformé l'image de l'école chez les gitans, mais nous n'avons pas franchi le cap suivant : l'apprentissage d'un métier », explique Nathalie Beaufils. Même si la confiance s'est installée petit à petit entre les membres de l'école la Miranda et les familles, les relations sont sous le signe de la méfiance entre la communauté gitane et les « payos », le surnom donné par les gitans aux les non-gitans. Cette année, une cinquantaine d'enfants gitans continue sa scolarité au collège Jean Moulin, où des classes spéciales ont été créées. En revanche, aucun jeune ne poursuit l'école jusqu'au lycée. Très vite, la communauté reprend le dessus. Effrayés par la mixité qu'ils n'ont jamais connue, rappelés par d'autres jeunes qui ont quitté l'école, les élèves gitans reprennent le plus souvent le chemin que la communauté à déjà tracé. « Si nous allons trop souvent à la Miranda, on nous appelle les payos et on se moque de nous », explique Vincent. La pression de la communauté explique pour beaucoup l'abandon des enfants. Premier obstacle : la famille. « Dans l'idéal parental gitan, les enfants doivent construire leur vie à côté des leurs », explique Stéphane Henry, responsable du service actions socio-éducatives de Perpignan depuis 22 ans. Mariées dès l'âge de 13 ans, les jeunes femmes gitanes sont les premières à témoigner des coutumes de la communauté. « Pendant plusieurs années, les filles ne pouvaient pas se rendre au collège car les parents craignaient qu'elles aient des relations avec les enfants non-gitans », poursuit Stéphane Henry. Les professeurs et les éducateurs de la Miranda se heurtent souvent à un mur de silence et doivent tenir compte des coutumes de chaque famille. Et lorsque le mur est brisé, le carcan des traditions gitanes n'est jamais bien loin. « Les différences culturelles sont importantes. Les enfants doivent complètement modifier leurs codes de vie pour adopter ceux de l'école. Ce n'est pas leur monde », explique Jeanne, l'enseignante. Les intervenants doivent également faire face à une jeunesse qui ne se projette pas dans l'avenir. 90 % des jeunes de 18 à 25 ans sont sans emploi. « Les gitans viennent de connaître quatre générations de chômage. Quelle projection peuvent-ils avoir ? », souligne Stéphane Henry.

Pour certains professeurs, l'amélioration de la fréquentation passerait par une meilleure mixité sociale. « Ce n'est pas normal qu'en France, il y ait une école non-mixte», affirme Nicolas. L'éducateur perçoit l'école de la Miranda comme une manière d'éloigner les enfants gitans des autres établissements de la ville. Le professeur ne perd pas espoir. « Il y a des choses à faire. Je veux bien y croire mais il faut que tout le monde soit honnête : c'est un ghetto social ». Jeanne va plus loin : « c'est une zone de non-droit. Les lois ne sont pas appliquées. Ici, à Saint-Jacques, les enfants n'ont pas le droit à l'éducation ». Certains parents d'élèves n'hésitent pas à parler d'inégalité. Papa de deux enfants scolarisés à la Miranda, Marc-Baptiste a vécu la dégradation de la scolarité des enfants gitans. Pour lui, impensable de ne pas scolariser ses enfants. Père de famille, il a été lui-même proche des bancs de l'école mixte. « Je suis allée à l'école à Saint-Joseph, c'était une école mixte. Aujourd'hui, mes enfants ne veulent pas fréquenter des écoles non gitanes car ils ont peur de ne pas être ensemble. Je suis inquiet pour leur avenir», continue le professionnel dans l'immobilier. Plus tard, il espère que ses enfants iront au lycée pour passer leur Baccalauréat, même sa fille. « Il y a des parents gitans qui veulent que leurs enfants soient scolarisés, les traditions évoluent. Mais pour ça, il faut qu'ils apprennent à lire, écrire et compter», affirme-t-il.

« Le couvercle s'est levé »

« Il ne faut pas oublier qu’il y a encore quelques années, aucune femme ne laissait son enfant à un non-gitan », rappelle Stéphane Henry. Le responsable des actions socio-éducative de la ville perçoit depuis quelques années, une révolution sociale au sein des jeunes. « Aujourd'hui, les gitans savent lire et écrire. Ce n'était pas le cas pour les générations précédentes », continue-t-il. Une génération qui a connu Internet et les réseaux sociaux. « Les valeurs ne se sont pas perdues, mais elles sont en train d'être débordées. Le couvercle s'est levé », confie Stéphane Henry. Pour lui, il est encore trop tôt pour penser à une mixité scolaire. « Il faut d'abord remonter le niveau de la Miranda », estime-t-il. Depuis plusieurs mois, la Ville a décidé de changer de position face à l'absentéisme des enfants. « Après 2005, l'objectif était avant tout de changer l'image de l'école. Désormais, nous allons remettre de la fermeté. Il faut être plus répressif avec ceux qui ne jouent pas le jeu », explique Nathalie Beaufils. À la sortie de l'école, des femmes gitanes aux jupes fendues attendent leurs enfants en papotant. Les intervenants sortent, leur journée est terminée. Tous se demandent si l'école réussira un jour à retenir les enfants gitans. À quoi ressemblera la génération suivante ? « Pour l'instant, on s'adapte, mais je me sens seul. On s'essouffle », lance un des intervenants. Les institutions publiques ont réussi une première mission en prouvant que l'école pouvait s'adapter à la communauté gitane. Mais que devient un enfant gitan après 13 ans ? « Pour que nous avancions, il faut que d'autres leviers se mettent en place. Nous avons besoin de soutiens », résume Stéphane Henry.


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